CHAPITRE6: Ne me quitte pas, je t'en prie.

Nombreux sont ceux qui disent avoir souffert mais peu ont vraiment connu les affres de la souffrance. Ceux qui ont souffert n’en parlent pas, ou du moins, en parlent peu. Mais c’est dur et malsain de tout garder à l’intérieur de ce pauvre petit cœur ou de ce petit cerveau.
Peu importe où elle est logée, la souffrance fait des dégâts et il n’y a pas de quoi en être fier au point de la proclamer. On dit qu’il faut juste trouver le moyen de l’extérioriser. Moi je l’écrit, certains la chante et d’autre la joue.

Lorsque j’eus mon Certificat d’Etude du Premier Degré(CEPD), mon père m’annonça que je devais poursuivre mes études secondaires au nord du pays. Selon mes tantes, il craignait que je m’expose au dérèglement des mœurs de la capitale beaucoup plus moderne. Mais la raison que mon père avançait était différente. Selon lui, le système éducatif du nord est bien meilleur que celui du sud. C’est bien vrai, je l’ai remarqué plus tard. Je me rappelle ce jour à la gare routière.
Mon père me donnant des dernières consignes et essayant tant bien que mal de cacher sa tristesse. Il vérifia l’emplacement de mes bagages et me rappela de garder mon pullover en main au cas où j’aurai froid et de consommer le sandwich aux omelettes qu’il avait préparé pour moi à l’aube. Il est resté jusqu’à ce que je ne m’installe dans le bus. Le klaxon venait de retentir. Il était temps de partir. J’ai cherché mon père du regard et je l’ai aperçu me cherchant aussi du regard. Nos regards se sont croisés. Je lui ai fait de petits signes d’au revoir, il a réciproqué, et le bus m’a éloigné de lui. Ne trouvant pas mon mouchoir, j’ai plongé ma tête dans le paquet contenant mon sandwich et j’ai laissé couler mes larmes. Il n’était pas question d’être vulnérable face à tous ces inconnus. La dame assise à ma droite m’a alors prise dans ces bras.

J'avais dix ans, j’avais encore besoin de mon papa, j’avais encore besoin d’amour, mais ce jour là, dans les bras de cette dame, j’ai compris que c’était de ma mère dont j’avais le plus besoin.

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